Dramas, Dramas philippins

Chasing Sunsets ou la poursuite du bonheur

C’est une critique pouvant potentiellement déclencher des angoisses puisqu’elle va traiter de la santé mentale de façon réaliste (dépression, évocation du suicide, anxiété, bipolarité, schizophrénie, état de stress-posttraumatique…). Si vous êtes dans ce cas ou dans un état d’esprit peu enclin à supporter ce type de lecture, je vous déconseille de continuer. Et le drama (si vous décidez de le commencer) est également doté d’une mise en garde à chaque début d’épisode. Prenez soin de vous ❤

❤❤❤❤❤

Ecrire après plusieurs mois d’absence sur un drama qui m’a fait autant d’effet que Chasing Sunsets, ça relevait quasiment du miracle. 

Depuis la collaboration avec Jodie, je ne m’en sentais pas capable, submergée par le nombre de sorties et de visionnages de dramas. Néanmoins, j’ai continué d’avancer sur mon journal de visionnage gigantesque (la liste s’allonge encore, au secours) et mon petit projet pour août mais sinon, rien de concret. D’autant plus que j’ai choisi de nouveau une série pas forcément évidente à regarder, poignante alors que j’aurai pu écrire sur un drama plus joyeux. Mais ce ne serait pas moi, j’ai une prédisposition fascinante, consistant à me compliquer la vie et à me mettre des bâtons dans les roues en permanence. Je trouve que c’est plutôt cocasse mais je m’écarte du sujet initial. 😁

Début juillet, j’ai découvert Chasing Sunsets grâce à une personne que je suis sur Twitter et qui partageait ses premières impressions sur ce dernier. J’ai tout de suite été intriguée par le titre, les deux actrices principales et les paysages où se déroulait l’histoire. En me renseignant, je me suis rendue compte que c’était un drama philippin et comme le hasard fait bien les choses, j’étais justement en train de visionner deux bl de ce même pays (Hello Stranger et Gameboys the series)  dont un qui mènera à un gl lui aussi (Pearl Next Door). Cette nouvelle m’a encore plus motivé pour le regarder puisque c’est une preuve que les mentalités changent, lentement mais sûrement. Sans cette personne, je serai passée à côté de cette merveille car cette série a été peu plébiscitée à l’international; malgré le travail de communication exercé par le studio de production sur les réseaux.

Chasing Sunsets, c’est une série queer de cinq épisodes (dont le dernier a été scindé en deux parties) réalisé par Renz-Bhil Tugelida et écrit par Stephanie-Rose Quiros. Ce sont deux militants promouvant l’égalité dans la communauté LGBTQA+ et sensibilisant les personnes concernées/ le public aux questions de santé mentale ainsi qu’au HIV.                                          

Le réalisateur (faisant également parti de cette communauté) a réussi à créer avec la scénariste (diagnostiquée avec une dépression et de l’anxiété), une œuvre sans la pratique quasi systématique du queerbaiting, une œuvre allant plus loin qu’une romance entre deux femmes et les premiers émois, une œuvre où l’on est confronté(e)s directement aux questions évoquées dans Chasing Sunsets. 

Une œuvre qui nous ouvre les yeux, grâce à son réalisme sur les difficultés que rencontrent les personnes concernées. Une œuvre permettant de nous éduquer, de déconstruire les clichés et de combattre la stigmatisation autour des relations homosexuelles et des troubles mentaux. Une œuvre qui va donner plus de force à la communauté LGBTQA+, en particulier aux femmes lesbiennes et bisexuelles (ainsi que pansexuelles), une voix qui va amplifier les productions de films lesbiens déjà existants.

Une œuvre qui à travers l’Amour (entre deux femmes ou deux hommes, entre amis, envers un enfant), va provoquer une prise de conscience pour le public, autour des clichés caractérisant les troubles mentaux, la transmission du HIV et les relations homosexuelles. Permettre à ce dernier de mieux comprendre les problématiques entourant la santé mentale, en l’y sensibilisant à travers ces représentations.       

Une interview (conduite par PsychoMilk) de Renz-Bhil Tugelida et Stephanie-Rose Quiros; permet de savoir qui ils sont, de savoir comment ils en sont venus à créer cette série, de mieux connaître leurs motivations et leurs actions en faveur de la communauté LGBTQA+.  Je l’ai trouvé très intéressante car on sent leur sincérité dans leurs engagements respectifs et j’aime beaucoup les écrits, surtout les poèmes, de la scénariste. 

Chasing Sunsets raconte l’histoire de Lara, passant des vacances à la Union, dans un camping nommé ‘’Camp Avenue”. Durant ce contexte peu rassurant avec le covid 19, elle va devoir rester plus longtemps que prévu et y fera la rencontre de Farrah, la propriétaire du camping. Pendant ce séjour, au gré des vagues et des couchers/levers de soleil, tous les protagonistes vont apprendre à s’accepter et trouver qui ils sont; évoluer au contact des autres et se soutenir mutuellement. 

Des personnages interprétés avec talent: 

Ce drama philippin est devenu réalité, non seulement par un réalisateur et une scénariste engagés et doués mais grâce à des acteurs/actrices qui se sont beaucoup investis et ça s’est ressenti dans la série. Encore une fois, je n’avais pas envie de quitter ces personnages et Camp Avenue. Je m’y sentais plutôt bien malgré le contexte actuel. 

Lara (Aura Dominique)

Enfin une représentation d’un personnage féminin souffrant de dépression, d’anxiété et de schizophrénie! Certes, l’actrice n’est pas concernée mais c’est tellement rare qu’il fallait que je souligne ce point. Son personnage est une jeune femme aspirant à devenir écrivain et rédigeant entre autres, des poèmes, de la prose et des écrits inspirés de sa vie. C’est ce qui l’aide à s’en sortir et ne pas étouffer, avoir un but qui l’encourage. Cela faisait plusieurs années que je n’avais pas regardé de dramas provenant des Philippines donc je ne connais aucun acteur ou aucune actrice. Tout ce que je sais, c’est qu’elle a joué dans une série antérieure à Chasing Sunsets avec le même studio de production. Comme James dans Skate our souls, j’ai été impressionnée par sa performance, j’espère vite la revoir ❤ 

Farrah (Donna Erno) 

C’est un personnage extraordinaire: intelligente, belle, dynamique, empathique, elle ne juge pas et fait de son mieux pour aider les autres. Propriétaire du camping Camp Avenue, cette jeune femme, s’identifiant comme lesbienne et mère célibataire d’une petite fille, va très vite tomber sous le charme de Lara (la scène du café, iconique) et être un soutien sans faille pour elle. Malgré ses propres difficultés, Farrah s’accroche et peut compter sur ses amis. C’est la première fois que je voyais à l’écran, un personnage aussi humain et bienveillant, quand elle ne sait pas quelque chose, elle se renseigne auprès de spécialistes pour ne pas blesser Lara. 

Donna Erno était l’actrice parfaite pour compléter ce duo avec Aura Dominique, elle m’a bouleversée et réconfortée en même temps. A suivre également!

Quand je regarde mon/ma crush en pensant être discrète… 😁

Cheche (Rose Ann Pascua)

Mademoiselle “Here’s the tea” est une véritable bouffée d’air frais, qui nous permet de souffler entre plusieurs scènes pesantes. Cette jeune femme travaille au camping, elle est toujours souriante et positive, pleine d’énergie et sème le bonheur autour d’elle. 

Son jeu pourrait sembler exagéré mais je me suis vite attachée à elle donc j’ai apprécié la voir toujours pleine d’entrain, c’était une présence nécessaire. 

King (Marky Hora)

C’est le meilleur ami de Farrah, un jeune homme souvent occupé mais prenant toujours le temps d’aller la saluer et de prendre de ces nouvelles. Ils sont habitués à se soutenir l’un et l’autre et cette complicité se ressent. Lui aussi est toujours joyeux et en apprenant une mauvaise nouvelle qui va profondément l’affecter, King pourra de nouveau compter sur Farrah. 

Dominic (John Kevin Patacsil)

C’est le petit ami de Lara, il paraît plutôt amical et amoureux d’elle mais on ne peut pas dire qu’il profite de ces vacances: il ne lit pas, ne sort pas se promener, ne se baigne ou ne bronze pas. On le voit de temps en temps avec Lara mais les autres vacanciers ne semblent pas s’apercevoir de sa présence. Qui est t’il vraiment?

In love sacrifices are inevitable. Sometimes, it almost kills us.

But there is also love that will wake us up in our hallucinations

Because love accepts us with no conditions

In love all of us are equal

La première scène commence avec le personnage de Lara, avec un gros plan sur son visage. Cette dernière émerge à la surface de l’eau, ouvre doucement ses yeux et prononce ce monologue en nous fixant. Son regard est déterminé, elle n’a plus peur et il semble qu’elle ait enfin réussi à s’accepter, à se trouver.

Malgré nos différences, les troubles mentaux et les maladies qui pourraient nous toucher, notre sexualité, nous trouverons une personne qui nous acceptera sans conditions. Parce que nous avons tous le droit d’être aimé et d’aimer en retour sans devoir se sentir illégitime ou angoissé, comme on peut l’être dans la société. En amour, ce n’est pas grave si on ne répond pas aux normes exigées, si on ne se sent pas bien mentalement ou physiquement, si on a des aspirations jugées fantasques. L’amour sera toujours là, présent sous différentes formes, prêt à nous soutenir malgré les difficultés que nous rencontrerons.

C’est une scène assez simple mais elle permet de se concentrer sur le visage et les émotions de Lara, tout en donnant un avant goût de ce dont va traiter Chasing Sunsets.

Partons à la rencontre des troubles mentaux et du HIV dans Chasing Sunsets

Episode 1: Lockdown/New Found Home 

La série se déroule dans le contexte actuel de pandémie, dans la province de la Union. Elle se situe au nord-ouest de l’île de Luçon et à 275 kilomètres de Manille, la capitale. 

Le confinement (ECQ- enhanced community quarantine ) a été décrété sur cette île le 12 mars (effectif le 15) en commençant par Manille puis s’est étendu au reste de cette dernière. La ECQ est un confinement total, contraignant les habitants à ne pas sortir sauf dérogation ou en cas d‘urgence. Des mesures très restrictives, pour la plupart, ont été mises en place, pas toujours en accord avec la loi et qui ont inquiété la commission des droits de l’Homme. 

Le camping que dirige Farrah va être aussi concerné par la ECQ, ce qui va l’obliger à annuler tous les évènements prévus et activités habituelles, ne pas accepter de nouveaux touristes et que ceux qui sont déjà présents (comme Lara), ne puissent pas partir. 

Camp Avenue représente cette réalité de façon concrète mais au contraire d’une certaine série, personne ne sera mis en danger avec la pandémie. Ce lieu est plutôt montré comme un lieu rassurant, un refuge, une deuxième maison. 

Episode 2: Truth and Lies 

A la fin du premier épisode, Lara est en pleine crise, très angoissée, en proie à ses hallucinations auditives et visuelles (Dominic). Elle ne supporte plus cette situation malgré ses efforts pour s’en sortir. Une deuxième crise va survenir quand Farrah arrive à sa rencontre, car elle lui assure qu’elle n’a pas vu Dominic. Cette affirmation ébranle les convictions de Lara et provoquant de nouveau de l’anxiété chez elle, avec son coeur battant de plus en vite.

       

Ces crises sont des manifestations de la schizophrénie de Lara: sur l’ensemble des personnes consultant un psychologue (ou services de santé) aux Philippines, 42% d’entre eux souffrent de ce trouble mental. C’est la 1ère maladie mentale dans le pays, devant la dépression et l’anxiété, pourtant c’est celle dont on parle le moins. Pire, c’est un trouble inconnu pour une bonne partie de la population, ce qui renforce la stigmatisation à l’égard des personnes concernées. En 2016, la loi de santé mentale philippine (the Republic Act No. 11036) a permis de rendre plus accessible et moins onéreux les services de santé mentale, aux habitants. Cette avancée majeure a aidé à la mise en place de campagnes de publicité, de projets (également par le biais des universités) pour représenter la schizophrénie, dans la sphère publique, espace dont elle a été privée pendant bien trop longtemps. 

La schizophrénie est un trouble mental sévère et chronique se traduisant par une perte de contact avec la réalité. Elle peut être différente pour chaque patient(e) en fonction des symptômes qu’il/elle/iel a.                    https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/schizophrenie

Les symptômes présentés ici sont ceux étant considérés comme Productifs (hallucinations auditives et visuelles dans le cas de Lara, paranoïa, idées délirantes).

Négatifs (Lara s’isole, ne veut plus sortir et communiquer avec les autres, peu d’émotions et de volonté. Étant déjà touchée par la dépression, elle se bat tous les jours mais en ressort toujours épuisée, elle a l’impression que ses efforts sont vains). 

Dissociatifs (le symptôme le plus handicapant pour la vie quotidienne: manque de concentration, même si elle arrive à communiquer correctement; ce n’est pas le cas pour ses pensées et ses émotions, qui sont bouleversées et elle peine parfois à se faire comprendre. 

Farrah va découvrir les médicaments de Lara et va s’entretenir avec un médecin (c’était un vrai médecin!). Cette dernière lui explique que ces derniers sont prescrits aux patients diagnostiqués avec une dépression, trouble bipolaire et la schizophrénie. 

On apprendra par la suite que Lara a eu le diagnostic concernant la *dépression et **l’anxiété (elle ne dit rien pour la schizophrénie mais précise que certaines choses/propos peuvent déclencher des angoisses chez elle). 

* La dépression constitue un trouble mental courant, caractérisé par la tristesse, la perte d’intérêt ou de plaisir, des sentiments de culpabilité ou de faible estime de soi, des troubles du sommeil ou de l’appétit, d’une sensation de fatigue et d’un manque de concentration. (définition OMS)

** Il existe différents troubles anxieux: le trouble anxieux généralisé, le trouble panique avec ou sans agoraphobie, le trouble d’anxiété sociale, la phobie spécifique, le trouble obsessionnel compulsif et l’état de stress post-traumatique.

https://www.passeportsante.net/fr/Maux/Problemes/Fiche.aspx?doc=troubles_anxieux_douglas_pm-les-differents-types-de-troubles-anxieux

Dans le cas de Lara, je peux émettre seulement des suppositions, puisque je n’exerce pas dans le domaine médical 🙂

La situation de Lara est un moyen de rappeler que tout le monde peut être touché par des troubles mentaux, peu importe notre situation ou notre âge, on montre ce que l’on veut bien révéler aux autres. Il est important de ne pas juger en fonction de l’apparence ni de critiquer les personnes concernées, de s’éduquer et de les soutenir.

C’est un épisode abordant également les stigmatisations/clichés autour des mères célibataires et lesbiennes, (les pères fuyant leurs responsabilités) bien que Farrah soit tombé enceinte avant son coming out. Cet article montre les possibilités qu’ont les personnes LGBT aux Philippines, pour avoir des enfants, avec des explications à la fin sur ce qu’indique la loi concernant les adoptions et le mariage.

https://www.cosmo.ph/relationships/pinoy-lgbts-talk-about-having-kids-a613-20180224-lfrm2

Episode 3: With me

Farrah rentre « dans le monde » de Lara et apprend à mieux la connaître: la cinématographie, les plans caméra, leur jeu ainsi que leur alchimie subliment ces moments. Elles se complètent l’une et l’autre, leurs regards s’attirent et elles se comprennent.

People in love stink ❤

Episode 4: Through Ups and Downs

Après la fin de l’épisode 3, où les souffrances et angoisses de Lara montent crescendo, elle se questionne sérieusement sur son existence. La réalité va frapper de nouveau avec les conséquences de la pandémie. King se questionne sur la pression sociale, ce que les autres attendent de nous alors que nous mêmes ne savont pas où nous en sommes. Il va parler de ses angoisses concernant le HIV et Farrah va de nouveau être un soutien moral important.

KING & FARRAH BESTFRIENDS

Episode 5 (scindé en deux parties): Je vous laisse souffrir et sourire devant ce dernier épisode et apprécier les textes de la scénariste.

Comment sont perçus la santé mentale et le HIV aux Philippines?

Les Philippines est un pays faisant parti de l’Asie du Sud-Est, constitué d’un archipel de plus de 7000 îles, séparé en trois zones: Luçon, Mindanao, Visayas. C’est un territoire qui a beaucoup à offrir avec des paysages sublimes, son architecture et  des activités sportives variées. 

Mais pour la santé mentale et le HIV, c’est beaucoup plus complexe.

Quand on ne nomme pas le problème, il y a peu de chance que nous réussissions à y faire face et d’avoir la possibilité de trouver des solutions. Pour ce faire, il faudrait aller voir des spécialistes de santé et obtenir un diagnostic. En admettant que ce soit possible, beaucoup d’obstacles vont les attendre avant et après ce dernier. 

La société en elle même considère qu’après un traumatisme, on peut redevenir celui ou celle que l’on était avant. Devenir plus fort, rester positif et mettre ses soucis de côté. Le fait de nier les souffrances des autres parce qu’elles ne se voient pas, laissent les personnes concernées complètement désemparées. La stigmatisation peut venir de la famille, de l’entourage proche, des amis, du/de la conjoint(e) ou des collègues de travail. Si c’est aussi mal vu, c’est parce qu’il y a une méconnaissance assez importante du public à l’égard des troubles mentaux. La dépression et l’anxiété sont de plus en plus représentées (les patients concernés ne sont pas toujours bien vus)

mais la schizophrénie passe encore pour une maladie qu’ont seulement les fous, qu’ils seraient violents, ce qui nuit aux personnes ayant ce trouble. Ils sont donc plus susceptibles d’être agressés et jugés inadaptés à la vie en société (discriminés à l’emploi, pour avoir un logement, le mariage et avoir des enfants). Comme dit plus haut, c’est pourtant la 1ère maladie mentale touchant les habitants aux Philippines. Aucune représentation n’existait, comme c’est le cas généralement en Asie. Les seuls exemples qui me viennent à l’esprit sont It’s okay that’s love et Shoot my heart pour la Corée du Sud (j’ai un doute avec White Christmas) ainsi que Someday or One Day pour Taiwan.

Depuis la loi de santé mentale en 2016, les mœurs et les consciences ont évolué de façon significative. Des célébrités ont parlé publiquement des difficultés rencontrées avec leurs troubles mentaux, des projets ont été mis en place dans les universités pour alerter l’opinion publique sur les cas de suicide.

Le Centre National pour la santé mentale et l’association philippine de santé mentale, sont les deux principaux acteurs qui ont œuvré en faveur de cette loi et participé activement à promouvoir les troubles mentaux. Ils ont mis en place des programmes d’éducation pour les jeunes, des séminaires, aident à réintégrer les patients dans la société et proposent un cursus pour se former à la psychiatrie.

ABS-CBN, le plus grand réseau de diffusion et la plus grande entreprise multimédia du pays, a diffusé un documentaire  »Invisible » sur la santé mentale. Plusieurs interviews (en anglais ou en philippin) parlent de l’importance d’écouter les personnes souffrantes et des troubles mentaux dont la dépression ainsi que la schizophrénie.

https://www.abs-cbn.com/newsroom/news-releases/2019/9/19/abs-cbn-airs-docu-on-mental-health-on-sundays-be?lang=en

Chasing Sunsets est lui aussi un acteur représentant ce changement, la série a été diffusée du 12 juin au 18 juillet 2020, sur YouTube avec des sous titres anglais. Ce dernier détail va lui permettre d’obtenir un plus large auditoire, de sensibiliser plus de monde sur les troubles mentaux, le HIV et que l’amour viendra toujours à nous. Qu’un jour nous arriverons à nous accepter et trouver notre  »belle fin ».

Comment se passe la prise en charge médicale?

Selon la loi de santé mentale, il est dit qu’il sera plus facile d’accéder aux services de santé et que les coûts engendrés seront abordables (comme les médicaments). L’Etat reconnaît enfin le droit de la population aux service de santé mentale. Malgré cette loi, ce sont deux problèmes qui n’ont toujours pas été résolus. Les traitements pour les troubles mentaux sont très coûteux, en fonction du ou des troubles en question. Géographiquement parlant, les services sont plutôt situés sur l’île de Luçon (pour tout le territoire, ce sont les aires urbaines les plus favorisées) et il y a un nombre insuffisant de psychologues/psychiatres/infirmiers pour toutes ces personnes. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6646843/

Pour ce qui concerne le HIV, les Philippines font partie des pays les plus touchés, particulièrement entre les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. Les plus jeunes sont également touchés car les programmes d’éducation sexuelle ne sont pas adaptés voir inexistants. Les Philippines n’ont aucune loi de prévention concernant le HIV, seulement une loi qui contraint à ne pouvoir avoir accès qu’aux préservatifs et aux tests, à 18 ans. Les porteurs du HIV sont mal vus, ce serait des personnes venant de familles anormales ou que seuls les homosexuels sont touchés. Plus le gouvernement refuse de mettre en place une politique de soin et de faciliter l’accès aux préservatifs, plus les stigmatisations continueront et mettront en danger les personnes touchées.

Plusieurs films et séries ont parlé de ce sujet (HIV et AIDS), de Taiwan à la Thaïlande, en passant par la Corée du Sud et la Chine ainsi qu’aux Philippines et à Hong Kong.

A savoir: Gay Ok Bangkok (le plus connu en matière de prévention), Diary of Tootsies, Kalel 15 (avec Elijah Canlas, l’un des deux acteurs principaux de Gameboys), Mga Batang Poz, un futur BL 90 Days The Series (arrêter les stigmatisations concernant le Hiv aux Philippines), Bugso, A Cohabitation, You are my sunshine, Till Death Do Us Part, Cry me a sad river, For Love We Can. Je n’ai pas nommé d’œuvres japonaises parce que je n’ai pas de sources suffisantes mais je suis sûre qu’il en existe.

Un premier pas pour la représentation des troubles mentaux, du HIV

Le cinéma et les séries en général ont le pouvoir de renforcer des clichés ou au contraire, de sensibiliser; d’entraîner une prise de conscience. C’est la première qu’une série aux Philippines traitait de ces sujets et avec le contexte actuel, leur approche était intelligente. En raison de la pandémie, ils ont même fait appel à un réel professionnel de santé pour renseigner Farrah mais également nous, le public.

Le réalisateur fait parti de la communauté queer et l’a réalisé pour des personnes queer et la société; la scénariste a des troubles mentaux et a pu se servir de son expérience pour aider les acteurs/actrices.

La dépression, l’anxiété et la schizophrénie de Lara sont montrées sans détour: on assiste à ses épisodes psychotiques, ses angoisses, ses hallucinations. A chaque crise, la musique change et la caméra se concentre sur Lara, sans chercher à l’oppresser davantage. Ces crises rythment Chasing Sunsets et sont apaisées par les vagues. Ici (contrairement à Under the Sea), l’eau est un élément qui la porte vers les couchers de soleil, ne la détient pas prisonnière, l’accepte t’elle qu’elle est et l’aide toujours à remonter à la surface (autant au sens figuré qu’au sens propre). Son regard est souvent dirigé vers le ciel, il représente l’espoir et les rêves qu’elle poursuit, c’est également un autre élément qui la rassure (les personnages de Boo dans SOS et Ji An dans My Mister étaient calmés eux aussi par la vue du ciel).

Les femmes sont des personnages importants dans cette histoire: Lara est sans doute un des premiers personnes féminins (en Asie) à être diagnostiquée avec des troubles mentaux, Farrah une mère célibataire et lesbienne, dirigeant un camping et étant l’un des personnages les plus bienveillants que j’ai pu voir à l’écran. Au contraire de Simon dans SOS, elle comprend tout de suite que la situation de Lara est grave et qu’elle doit la soutenir, l’écouter. Cheche est une femme dynamique, enjouée mais qui a subi également des évènements très difficiles et ce point a été abordé avec beaucoup de compassion.

Le personnage de King est très intéressant puisqu’on ressent à travers lui et ses émotions, l’angoisse de mourir s’il est testé positif et de ne plus être là pour ses proches. Ses questionnements sur la pression sociale mis en opposition avec les réels désirs des personnes sont un point essentiel dans la série.

Durant la Q/A de la semaine dernière, chaque acteur/actrice avait une journée dédiée pour qu’on lui pose des questions. J’ai pris en capture sur Twitter celles de Aura Dominique parce qu’une nouvelle fois, je me suis identifiée au personnage de Lara, comme pour Boo. Cela montre à quel point le tournage a été épuisant mais également comment cette série est vraiment une réussite.

Le genre girl’s love aux Philippines

Ce dernier a du mal (comme en Corée du Sud) à s’imposer et les représentations des femmes lesbiennes, bisexuelles ne sont pas légion.

Le pays est majoritairement catholique et a une mauvaise image des personnes LGBTQA+, l’homosexualité est perçue comme immorale et dégradante. L’église est le principal opposant au mariage pour tous et à leurs droits en général. Néanmoins, les églises présentes sur le territoire  n’ont pas toutes les mêmes convictions religieuses et évoluent positivement.  

Ils peuvent faire face à des difficultés que ne rencontreront pas des individus hétérosexuels : trouver un emploi, obtenir un logement, aucun droit pour se marier, fonder une famille (l’adoption n’est légale que pour un individu seul et ne reconnaîtra pas le deuxième parent du même sexe).

Bien que les hommes gays ne bénéficient pas d’une meilleure image, les BL sont de plus en plus nombreux et rencontrent un énorme succès. Ils s’améliorent également en terme de représentations mais sont encore frileux pour engager des acteurs LGBT. Et quand c’est le cas, ils finissent par interpréter des rôles clichés pendant des années et rester enfermer dans ce cercle vicieux.

Cependant depuis 2014, la situation a évolué de façon significative. Plusieurs films, séries et clips ont été crées, cela s’explique par le fait que la population accepte de plus en plus l’homosexualité et que le mouvement LGBT se soit battu pour leurs droits.

En 2006, est sorti le film Rome&Juliet. C’est l’histoire de Juliet allant bientôt se marier et engage Rome pour l’organiser. Va en suivre une histoire d’amour entre ces deux femmes aux caractères bien différents. Je l’ai vu quand j’étais en seconde, je me rappelle l’avoir apprécié mais ce n’est pas un coup de cœur. Néanmoins, je le conseille car c’est un des premiers films montrant une histoire d’amour entre deux femmes.

Petersen Vargas (2 Cool 2 Be 4gotten, Hello Stranger) a écrit et réalisé un court métrage ou plus exactement un clip de 3 min SWIRL pour l’artiste Aki Medina. Deux filles (Zy Carreon et Iyay Verona), jeunes et amoureuses, se déplacent à travers la ville, dans le sens inverse. J’ai beaucoup aimé comment la musique a été associée aux différents plans, l’alchimie entre les deux actrices et l’atmosphère qui régnait. Ce dernier a été diffusé et présenté au BFI Flare : The London LGBT Film Festival (2016).

En 2015, The Rich Man’s Daughter est le tout premier drama comportant un couple de femmes, Jade et Althéa (je ne suis pas sûre de pouvoir dire que c’est un gl à part entière). Il compte 65 épisodes, disponible sur Youtube et malgré quelques défauts, les avis sont enthousiastes!

Forever Natin (2016) est un court métrage, original dans le sens où cette fois, on parle de deux femmes adultes et non adolescentes/étudiantes.

En 2018, deux courts métrages ont fait parler d’eux : Embrace (Yakap) et As Time Flows By (Sa Pag-asa ng Panahon). Ils ont plusieurs thèmes en commun : les parents qui n’acceptent pas leur orientation et ont des idées conservatrices, les conséquences du coming out, les difficultés qu’elles rencontrent… Les deux films m’ont plu mais j’ai une préférence pour Embrace et ses symboles.

La même année est sortie Billie et Emma (Zar Donato qui est une actrice queer et Gabby Padilla), an LGBT coming of age story. Le trailer m’a emporté dès les premières secondes, j’étais euphorique après l’avoir vu et je rêve de voir enfin ce film. Et je pense que cet article pourra vous donner envie!

La scénariste et réalisatrice, Samantha Lee, avait également créé Baka Bukas (Maybe, Tomorrow) en 2017 et gagné plusieurs récompenses. Cette dernière milite pour une meilleure représentation des femmes et de la communauté LGBT dans le cinéma.

Egalement Elie & Frankie (la 3e histoire de Unlocked) et Everlasting,  (1 épisode, aucun rapport entre chaque segment).

Conclusion:

Chasing Sunsets permet de rendre visible des individus effacés, mis en marge de la société et stigmatisés. De montrer leurs difficultés et leurs joies, leurs souffrances et leurs petits bonheurs. C’est une nouvelle représentation donnant de l’espoir, traitant de sujets importants avec plusieurs points de vue, mettant en valeur les sentiments des personnages.

Ps: J’espère que ça vous donnera envie de voir Chasing Sunsets ou donner des idées dans les recommandations ❤

Ps 2: Parler des pulsions suicidaires était difficile pour moi donc j’ai choisi de ne pas montrer d’exemples.

Ps 3: Quelques sites m’ayant bien aidé 🙂

 https://pop.inquirer.net/95679/lesbian-series-coming-your-way-in-chasing-sunsets

https://cnnphilippines.com/life/culture/2017/04/25/mental-illness-stigma.html

https://www.cnnphilippines.com/life/culture/2018/6/13/schizophrenia.html

https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/schizophrenie

https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/schizophrenia

https://en.wikipedia.org/wiki/Mental_health_care_in_the_Philippines

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6646843/

https://www.philstar.com/headlines/2019/07/15/1934790/remove-stigma-mental-health-experts-urge-government

https://rappler.com/newsbreak/in-depth/philippines-readiness-address-mental-health

https://www.asianjournal.com/philippines/across-the-islands/mental-health-law-finally-in-the-philippines/

https://www.hrw.org/news/2016/12/08/philippines-policy-failures-fuel-hiv-epidemic

5 réflexions au sujet de “Chasing Sunsets ou la poursuite du bonheur”

  1. Merci pour cet article détaillé, informatif et qui donne envie de se pencher sur ce drama ♥ C’est vrai qu’autant j’ai vu pas mal de dramas BL, autant pour les GL, je n’ai vu que des films, il me semble, et pas de dramas… Et je ne crois pas avoir déjà vu abordé le HIV dans un drama autre que Kamisama Mou Sukoshi Dake, ou alors j’ai oublié…
    Je retiens le conseil, donc, ainsi que la liste de fin. Merci 🙂
    En plus, je trouve que le philippin est une très jolie langue. J’ai suivi, moi aussi, Gameboys (même si je suis un peu moins éprise que la plupart des gens sur twitter) et je trouve que cette langue a de très beaux sons. Donc c’est un bonus^^

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    1. Merci de l’avoir lu et je suis contente si ça pu te donner envie! 💓 Les GL, c’est assez pauvre comme contenu dans les dramas mais les films, c’est déjà une petite victoire 🙂 J’en ai prévu d’autres 😎
      Merci pour le titre, je vais me renseigner et le lire! De rien 🌸

      Oui je suis d’accord avec toi, c’est toujours un plaisir d’entendre cette langue 🙂 J’espère lire ton avis dessus, je suis curieuse (comme toujours) 🌸

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      1. Just to be clear: je ne recommandais pas Kamisama mou sukoushi dake. C’était juste pour dire que c’était le seul que j’avais vu jusque-là mais ce n’est pas un drama que j’aime beaucoup, et s’il a le mérite d’au moins aborder le sujet, je ne trouve pas qu’il le fasse très bien. C’est un classique et un drama populaire, donc si tu es curieuse, jettes-y un oeil, mais ce n’est pas un drama que je conseille, pour ma part^^

        Et je ne pense pas écrire sur Gameboys, j’ai trop de choses à écrire déjà^^ (deux projets qui me prennent pas mal de temps) Essentiellement, ce qui me retient d’aimer vraiment le drama, c’est que je trouve qu’il manque de naturel, autant dans sa construction que certaines interprétations (les deux acteurs principaux, ça s’arrange au fil des épisodes, mais je trouve Pearl à peine supportable, bien que le personnage lui-même soit hyper sympathique). C’est souvent mignon, il y a des moments qui m’ont émue, j’aime beaucoup l’acteur qui joue Gav, mais je ne suis pas plus emballée que ça par le drama dans sa globalité^^

        Voilà pour les précisions ^^ !

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      2. D’accord je comprends, merci pour tes precisions!
        Excuse moi, je ne voulais pas te rajouter de pression (oh super!) 💓
        J’aime beaucoup Gav également, un rayon de soleil 🌞 Pearl me fait penser à Cheche, je comprends ton ressenti, à voir ce que ça donnera pour le GL.
        Merci pour ton avis! 💞

        Aimé par 1 personne

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